#Tempo #NetGalleyFrance : Lu & Approuvé



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Ami.e.s De Lire bonjour,


Bienvenue dans notre rubrique Lu et Approuvé.

Avant de toute chose, je tiens à remercier chaleureusement NetGalley et les éditions Les Avrils pour cette découverte éditoriale remarquable.

Aujourd'hui nous allons parler du roman intitulé Tempo de Martin Dumont, à paraître en janvier 2024 aux éditions Les Avrils,  224 pages.


PRÉSENTATION DE L'ÉDITEUR

Une ballade rock pour saluer nos rêves de jeunesse et le temps qui passe.

À trente ans, la vie de Félix, c’est Belleville, sa compagne et leur bébé. C’est, le soir, jouer de la guitare dans des bars avec l’espoir tenace de voir sa carrière solo démarrer. Car la gloire, Félix l’a déjà frôlée. Tous les quatre, ils avaient le talent, l’audace, l’osmose. Il y avait la fièvre, l’excitation et l’insouciance. Leur groupe a décollé, puis tout s’est effondré. Alors, arrivé en ce point précis où l’existence l’exige, Félix doit faire un choix : poursuivre encore le rêve ou changer de regard sur sa réalité. 

#Tempo #NetGalleyFrance


La vie après la gloire 


Tempo est un roman fictionnel qui raconte l'histoire de Félix, chanteur guitariste qui, à trente ans, et par la force des choses, se retrouve à la croisée des chemins entre poursuivre ses vieux rêves de carrière de rockstar ou participer aux charges du foyer. 

Avec l'heureuse arrivée du petit Élie, le couple Bellevillois s'est agrandi et Anna, infirmière aux urgences et maman épuisée, ne serait pas contre un peu d'aide de la part de son compagnon. 

L'heure est au bilan : il est temps de se remémorer l'histoire avant de se tourner vers l'avenir.

Pour ma part,


Inspirant et au plus près de la réalité de nos vies.

La plupart des récits racontent des "success stories": des histoires de gens partis de rien qui, grâce à leurs efforts et leur opiniâtreté, rencontrent la fortune. 

Tempo n'est pas l'histoire d'un rêve, mais plutôt l'histoire d'une réalité : celle de tous les artistes en mal de vivre de leur art.

Le narrateur, Félix Pogam, est l'un deux. 

Sa jeunesse avait été marqué par la création de son groupe de rock avec son meilleur ami Louis, à qui il doit sa passion pour la guitare, suivi d'Alex, la bassiste et de Rémi à la batterie. Contre toute attente, le band a bien fonctionné : des cabarets, des concerts, des festivals et même l'enregistrement de leur premier album studio. Que de signes tangibles pour leur prédire une carrière à la Rolling Stones. Félix, lui, s'y imaginait déjà. 

Puis un jour, la séparation et le retour à la réalité. Là-dessus, je ne vous en dis pas plus, vous le découvrirez en lisant le roman.

Non sans nostalgie, la narration oscille entre la rétrospective du groupe de rock : les années lycées et les tournées, et le présent qui se déroule fin des années 80 à l'époque où le paysage musical est en pleine mutation, notamment avec l'obsolescence des groupes de "garage rock"...

Cette histoire m'a captivée, grâce au style de l'auteur au plus près de la réalité de nos jours : une plume sobre, réaliste et des descriptions pleine de justesse. Tant et si bien que, même sans être guitariste moi-même, il m'a été aisé de m'identifier aux protagonistes : et que deviennent alors nos passions lorsque le temps passe, le vent tourne et qu'une montagne de factures nous attend ?

Les propos d'Hervé, l'un des personnages, m'ont été révélateurs et disaient en substance : il y a deux jours marquants dans la vie d'un peintre : le jour où il se rend compte qu'il ne sera jamais Picasso et le jour où il recommence à peindre.

Ce récit s'adresse aux guitaristes ex-rockstars, à toutes et tous les artistes et toutes celles et ceux qui, pour de multiples raisons, ont du reformuler leur ambitions mais sans jamais renoncer à la création.

J'ai a-do-ré, je recommande.



Quelques citations :


"La guitare vibre, je la presse contre ma poitrine. Sept ans que sa couleur brune m’accompagne partout. J’aime ses touches en palissandre, son vernis satiné et la rondeur du son qui émane de sa caisse. Derrière elle, je me sens à l’abri. Comme en retrait du monde."


"J’aime dire que c’est un blues, mais je n’en suis pas sûr. Ça raconte la fin d’une histoire. Pas forcément l’amour, l’amitié aussi. Le vécu en commun. Ce n’est pas triste, peut-être un peu mélancolique. Ça dit qu’on n’y croit plus mais que ce n’est pas grave, qu’il reste quelques regrets et de beaux souvenirs. Surtout pas de remords."


"Anna voulait que je lui chante aussi les miennes mais je n’ai pas osé. Je ne me l’explique pas. Trois fois je suis resté planté devant mon fils, guitare sur les genoux. Je n’ai jamais réussi à sortir une note."

"Je n’ai pas vraiment de manager. J’ai Marc. Il travaille avec de nombreux musiciens. Je n’ai jamais compris s’il était producteur ou agent. Il dit qu’il a bossé quelques années à Londres, qu’il était chargé de repérer des groupes pour un label anglais. Il connaît tout le monde. Il répète qu’il se contente de filer des coups de main, qu’il n’a pas de contrat et qu’il est libre comme l’air. Je ne sais pas comment il gagne sa vie. Quand je pose la question , il me répond que sa religion interdit de parler d’argent. – Ta religion ? – Le rock’n’roll, Félix."

"Arrivés en classe, on s’est installés tous les deux . J’ai vite compris qu’il était aussi soulagé que moi. C’est ce qui nous a d’abord liés. La solitude, la détresse des nouveaux. Cette peur tenace de rester de côté. À deux, on se sentait moins vulnérables."



"À ceux qui osaient se moquer, je rétorquais qu’un bon guitariste était capable de faire sonner une planche. La réplique en jetait et clouait quelques becs. Mais dès que j’ai eu assez d’argent, je me suis payé une belle électrique."


"Mes parents avaient une cave dans notre immeuble, on en a fait une salle de répétition. Comme il n’y avait pas d’électricité, on devait tirer des rallonges depuis l’appartement situé au deuxième étage. Une vieille voisine du rez-de-chaussée nous traitait de sauvages et débranchait systématiquement."


"On bossait comme des dingues. On voulait progresser, constituer un set et se produire. Le samedi était le plus beau jour de la semaine. Une fois épuisés, on rangeait les instruments, on débriefait, puis on sortait faire la fête."


"– Attends Félix, tu ne vois pas le problème ? Je viens de reprendre et je bosse déjà comme une tarée pour qu’on puisse payer les factures. L’appartement, les courses, la garde d’Élie. On n’a même plus assez pour partir en week-end. Et toi ? Tu fais quoi exactement ? Ça fait dix-huit mois maintenant que tu as quitté La Pieuvre. – Mais je bosse, moi aussi ! Je compose, j’enregistre, je fais des concerts. J’ai un contrat avec un bar, je te rappelle !"


"Guitare et percussions. Trois arpèges et cette voix qui vous prend à la gorge. C’est une chanson d’une tristesse infinie. Une histoire de résignation et de rêves avortés. D’une femme désabusée, d’un homme incapable d’assumer. D’espoirs sans cesse déçus et de l’amour qui s’éteint."


"On était à l’aise sur scène, on s’y sentait bien. Pour Louis, c’était encore plus que ça. Rien ne le rendait plus heureux. Il disait que c’était le but, l’aboutissement de tout notre travail. Que sans partage, la musique n’avait aucun sens."


"J’aimais ces après-midi tous les quatre, à s’échiner ensemble sur nos instruments. L’effort, la recherche, le tâtonnement jusqu’à entendre le morceau prendre forme. Les courts moments de grâce pendant lesquels on parvenait à créer quelque chose. J’aimais nos regards hésitants, nos fronts plissés, nos mains de plus en plus précises. Nos corps tendus et nos talons qui martelaient le rythme. J’aimais surtout cette joie lumineuse une fois la chanson en place. Quand la musique nous emmenait si loin, si haut, qu’il nous fallait près d’une semaine pour pouvoir redescendre."


"– Cite quelques références. Mais pas trop non plus, attention. C’est ton papier, il ne faut pas s’effacer. Et puis fais-moi plaisir, épargne-nous les groupes archi-connus. Je ne dis pas qu’il faut balancer d’obscurs artistes dont personne n’a entendu parler, les gens détestent les intellos. Non, mais quand même des trucs qui en jettent. Des chanteurs un peu niche, tu vois ?"


"Je raconte ce que je ressens. Quand je joue, quand j’écris. Quand je cherche l’inspiration. Je lui explique l’importance de tout ça. Avec ou sans un groupe. La certitude d’avoir encore des choses à dire, des chansons à donner qui peuvent toucher les gens."


"Je peux jouer mes chansons à condition que j’intègre une série de classiques. Les consignes sont claires. Il faut changer souvent, se renouveler, ne pas lasser la clientèle. J’ai accepté ce boulot parce que ça payait un minimum et que c’était une façon de vivre de la musique. Aujourd’hui je regrette. C’est chaque fois plus dur de revenir ici."


"J’y mets tellement de moi. Tellement de cette envie de bouleverser les gens, comme tant de musiciens m’ont bouleversé avant. C’est pour ça que j’écris. Pour dire comme la musique est belle, comme elle peut nous sauver. Comme elle est essentielle. Je joue, encore et encore. Et seulement pour eux maintenant. Parce que Louis avait raison. On n’a pas tout perdu si un seul vous écoute. Si l’on provoque un début d’émotion. Même minuscule, même un rien éphémère. On n’a pas tout perdu si l’on fissure un mur."


"Dans la pénombre, Élie me dévisage. Est-ce qu’il devine  ? Est-ce que je lui fais honte  ? Il doit bien se rendre compte que je suis un pauvre type. Un chanteur sans public, un musicien raté dont les chansons n’intéressent personne. Un perdant. Un père incapable de jouer pour son fils."

"C’est pour ça que je joue. Sur des scènes fatiguées, au fond des salles obscures. Dans les bars où personne n’écoute. Pour exister, pour avoir l’impression de vivre. Pour partager ce qui bouillonne en moi. La joie, la peur, l’amour, la peine. Tout ce qui me tord les tripes ou me rend follement heureux. Je joue pour qu’on se souvienne, pour couvrir les sirènes du néant. Pour oublier ne serait-ce qu’un instant l’absurdité de la fin et le vertige du vide."

"– C’est plus possible, Félix . Je n’en peux plus. Ta musique, tes frustrations, ça te rend invivable. Le sanglot dans sa voix me glace."


"J’adorais cet instant, ce chemin vers la scène . Selon les salles, ce pouvait être des escaliers, un couloir ou une cour. Il fallait traverser en file indienne, les guitares à la main, le pouls de plus en plus rapide. On ne se parlait pas. Chacun enfermé dans sa bulle, à se débattre avec le cocktail d’émotions. L’excitation, l’appréhension et la pointe d’impatience. Jusqu’à l’obscurité au moment de faire son entrée. Ensuite il n’y avait que les cris, la fureur du public devinant les silhouettes. Branchements, une dizaine de pas pour prendre ses repères, puis le pouce levé en direction de la console. On attendait toujours quelques secondes avant de commencer. Presque rien. L’ultime frisson avant la déferlante."


"Tireurs d’étoiles. Une histoire de rêveurs , de gamins assis autour du feu. De rires et de promesses qu’on échange au creux de la nuit. Des mots qui disent la folie des grandeurs, l’espoir d’un destin sans pareil. Et même si l’on se ment. Même si l’on n’y croit plus et que c’est juste pour rire. Cette chanson est une parenthèse. Une dernière soirée à rêver en oubliant le reste."


"Rémi a couvert les protestations d’un roulement de caisse claire et Alex l’a rejoint. C’est Louis qui a donné le tempo. Il a sauté en l’air à l’instant où je plaquais le premier accord."



"Dans moins de vingt-quatre heures, j’aurai toutes mes réponses. Bonnes ou mauvaises, il faudra faire avec. C’est comme si toute ma vie m’avait mené à cet instant précis. J’ai peur. Qu’est-ce qu’il nous reste exactement une fois qu’on a laissé filer nos rêves ?"



"– Est-ce que tu vas encore voir des concerts ? Tu allumes la radio ? Non ? Tu devrais prendre le temps d’écouter ce qui se fait. Et regarder le public, aussi. Les jeunes surtout. Ce sont eux qui achètent les albums, eux qui décident qui seront les grands de demain."


"– Il ne faut pas m’en vouloir, il poursuit d’un air désolé. Je te promets, c’est bien ce que tu fais. Il y a une âme, on sent que tu y mets tout ce que tu as. Le problème, c’est qu’il n’y a plus de public pour ça. J’ai déjà essayé, ça ne marche pas. On peut trouver que c’est triste, mais c’est la vérité. C’est une question de tempo. – De tempo ? Il secoue la tête. – De timing, quoi. De moment, de mode, d’époque, appelle ça comme tu veux. Ce que je veux dire, c’est que ta musique , ce n’est pas ce que les gens veulent entendre aujourd’hui. Demain peut-être. Qui sait ? Tout est possible après tout. Mais là non, vraiment. Je ne peux rien pour toi."


"–  Je suis désolé, je murmure. Si j’ai coupé les ponts avec tout le monde, c’est juste que…C’était plus facile, tu comprends  ? J’avais besoin de faire le deuil."



"– Tu comprends, Félix ? La vie, sans les moments difficiles, ça n’existe pas, hein ? Je veux dire, ce sont eux qui donnent du sens à tout. Qui nous inspirent, qui mettent en valeur le reste. Le plaisir, les frissons, le bonheur. Tout ce que l’on poursuit sans cesse. Et ce que l’on a vécu avant bien sûr ! Il faut ça pour se rendre compte à quel point c’était fort. À quel point c’était grand . Tu ne crois pas ?"

 


Martin Dumont in Tempo, Les Avrils, 2024.

Chapitres


I. Gimme shelter
II. Tireurs d'étoiles 
III. Trois, quatre 

Pour conclure, 


#Tempo #NetGalleyFrance

+ Le bon point : Un beau récit, sans fantaisie mais tellement plein de véracité, au plus proche de la réalité des artistes qui n'ont pas la chance de vivre de leur art. Un thème rare depuis Ma Tempête d'Éric Pessan. Une lecture que je n'oublierai pas de sitôt.


* La note De Lire Délire : 19,5 /20

LE SAVIEZ VOUS ?

Martin Dumont est un romancier français né à Paris en 1988. Il travaille comme architecte naval. Son premier roman, Le chien de Schrödinger, est paru en 2018. Son deuxième roman, Tant qu'il reste des îles, a reçu le Prix du Livre France Bleu - PAGE des Libraires en 2021. Tempo est son dernier roman, à paraître aux éditions Les Avrils en janvier 2024. 

Et vous, allez-vous lire Tempo de Martin Dumont ?

#Tempo #NetGalleyFrance


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Littérairement vôtre,

Aïkà