#Sonodeuraprèslapluie#NetGalleyFrance_ Lu & Approuvé


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Ami.e.s De Lire bonjour,

Bienvenue dans notre rubrique Lu et Approuvé.

Avant de commencer, je tiens à remercier derechef NetGalley et les éditions Stock pour cette découverte éditoriale mémorable.

Aujourd'hui nous allons parler du roman intitulé Son odeur après la pluie de Cédric Sapin-Defour, paru en mars 2023 aux éditions Stock, de la collection La bleue, 270 pages.

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LE SAVIEZ VOUS ?

Cédric Sapin-Defour est un écrivain français né en 1976. Il est aussi journaliste, alpiniste et professeur d'éducation physique et sportive. Il vit entre Grenoble et Beaufort, en Savoie. Il a publié plusieurs livres sur la montagne, l'alpinisme et la nature, dont Alpinistes extraordinaires (2016), La Montagne et le ver à soie (2018) et Son odeur après la pluie, sélectionné pour le prix Renaudot 2023 dans la catégorie "Essais". Cédric Sapin-Defour écrit aussi des chroniques pour le quotidien Libération et la revue en ligne Alpine Mag.

Jean-Paul Dubois est un écrivain français né en 1950 à Toulouse, où il vit toujours. Il a été journaliste au Matin de Paris et au Nouvel Observateur, avant de se consacrer à la littérature. Il a publié une vingtaine de romans, dont Une vie française (2004), qui a reçu le prix Femina et le prix du roman Fnac, et Tous les hommes n'habitent pas le monde de la même façon (2019), qui a reçu le prix Goncourt. Il est connu pour son regard désabusé et humoristique sur le monde et les rapports humains, ainsi que pour son style simple et efficace. C'est lui qui a écrit la préface de Son odeur après la pluie de Cédric Sapin-Defour.

Présentation de l'éditeur


C’est une histoire d’amour, de vie et de mort. Sur quel autre trépied la littérature danse-t-elle depuis des siècles ? Dans Son odeur après la pluie, ce trépied, de surcroît, est instable car il unit deux êtres n’appartenant pas à la même espèce : un homme et son chien. Un bouvier bernois qui, en même temps qu’il grandit, prend, dans tous les sens du terme, une place toujours plus essentielle dans la vie du narrateur.


Ubac, c’est son nom (la recherche du juste nom est à elle seule une aventure), n’est pas le personnage central de ce livre, Cédric Sapin-Defour, son maître, encore moins. D’ailleurs, il ne veut pas qu’on le considère comme un maître. Le héros, c’est leur lien. Ce lien unique, évident et, pour qui l’a exploré, surpassant tellement d’autres relations. Ce lien illisible et inutile pour ceux à qui la compagnie des chiens n’évoque rien. Au gré de treize années de vie commune, le lecteur est invité à tanguer entre la conviction des uns et l’incompréhension voire la répulsion des autres ; mais nul besoin d’être un homme à chiens pour être pris par cette histoire car si pareil échange est inimitable, il est tout autant universel. Certaines pages, Ubac pue le chien, les suivantes, on oublie qu’il en est un et l’on observe ces deux êtres s’aimant tout simplement.


C’est bien d’amour dont il est question. Un amour incertain, sans réponse mais qui, se passant de mots, nous tient en haleine. C’est bien de vie dont il est question. Une vie intense, inquiète et rieuse où tout va plus vite et qu’il s’agit de retenir. C’est bien de mort dont il est question. Cette chose dont on ne voudrait pas mais qui donne à l’existence toute sa substance. Et ce fichu manque. Ces griffes que l’on croit entendre sur le plancher et cette odeur, malgré la pluie, à jamais disparue.

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Ode au compagnonnage canin et animal


Son odeur après la pluie est un roman autobiographique qui raconte l'histoire entre le narrateur et son chien, Ubac, un bouvier bernois. 

C'est un texte qui célèbre le lien unique et sacré qui unit les deux êtres, au-delà des différences d'espèces. 

C'est aussi l'exploration des sensibilités perdues que la compagnie des animaux nous aide à retrouver.

Pour ma part,


J'ai lu ce roman avec énormément d'intérêt. 

Un intérêt littéraire dans un premier temps, car la réputation de cette œuvre est élogieuse en terme de qualité d'écriture; pour preuve: à ce jour, ce livre fait partie de plusieurs sélections 2023 de prix littéraires. 

Le style de l'auteur, primo-romancier, est remarquable, à la fois poétique et sophistiqué avec des expressions originales et exotiques. Par exemple, dans cette phrase que je cite : 

"Il remue calmement, la neige ne le sidère pas, un des ancêtres de son razana bernois doit lui chuchoter qu’il n’y a pas lieu de la craindre."
 
J'ai été charmée par l'utilisation de l'expression "razana" qui est, si je ne me trompe pas, d'origine austronésienne. Un texte captivant en somme, dont les subtilités tous azimuts restent à découvrir au fil de la lecture. 

Puis, dans un second temps, un intérêt éthique voire philosophique : en racontant la relation entre Ubac le chien, et son maître, le narrateur, ce roman est le témoignage de la valeur et de la dignité de chaque être vivant. 

De A à Z, de la parution d'une annonce de vente de chiot dans un journal jusqu'au moment précis où le narrateur écrit les lignes de ce livre, nous assistons à l'histoire d'un édifice : la construction d'un lien inimitable, profond et merveilleux composé d'amour, d'amitié, de fraternité, de protection, de complicité et de toutes autres formes de communions possibles et imaginables entre un humain et son chien. Soit treize ans de bonheur et de félicité. 

Car oui, ici, il est également question du cycle de la vie : un jour tout va disparaitre puis renaitre sous une forme nouvelle... Une réflexion sur la mort, le deuil, et la mémoire, comme une piqure de rappel. 

J'ajouterai que, au delà les frontières de la taxonomie, cette lecture concerne tout être humain vivant avec un animal ou des animaux de compagnie.  

En somme, ce roman est une gratitude envers tous les êtres vivants et une invitation à respecter la diversité du monde. 


Quelques citations:

"Ce texte est un précis d’intelligence et d’amour entre deux êtres que tant de choses pourtant séparent."

"Alors voilà, le livre que vous allez lire est un précis d’amour et de conduite qui vous guidera peut-être jusqu’à cette frontière immatérielle au-delà de laquelle les chiens parlent aux hommes . Vous allez y apprendre d’étonnantes choses sur eux et sur vous-même."

"Ça n’est pas rendre visite. Ni piocher un élément supplémentaire de réflexion. Ni ajourner. C’est provoquer. Faire se rencontrer deux êtres vivants et joindre leurs histoires pour des milliers de jours. On ne ment pas aux amours naissantes."


"Prendre un chien, c’est accueillir un amour immarcescible, on ne se sépare jamais, la vie s’en charge, les déclins sont illusoires et les fins insoutenables. Prendre un chien, c’est se saisir d’un être de passage, s’engager pour une vie ample, certainement heureuse, irrémédiablement triste, économe en rien."


"Je me dis que le samedi est une très mauvaise journée pour prendre d’importantes décisions susceptibles de dessiner la vie d’après. C’est un jour de vulnérabilité économique et symbolique. Pour un peu que la semaine ait été pesante , on réclame son dû de légèreté, son rabiot d’après tout, souvent plus qu’il n’en faut et l’on balance jusqu’à l’extravagant."


"Le mensonge à soi-même a ceci de supérieur qu’il est aimablement pardonné, alors on fait semblant de croire aux possibles reculades."


"– Allons voir les boubous ! J’ignore s’il faut tirer une quelconque satisfaction à ce qu’une sentence enfantine vous soulève l’âme aussi puissamment que le feraient deux vers de Rimbaud mais c’est ainsi, le cœur est à ce point généreux qu’il accueille toutes les fatalités au bonheur. Je réponds « avec plaisir » ou quelque chose du genre pétrifié."


"Car si les êtres déterminés ont mon admiration, j’ai pour ceux qui errent un indécrottable petit faible."


"Il est là, je ressens déjà sa présence, sa tête engluée à mes rotules, son ronflement serein, son odeur après la pluie, le présage poussé à l’intense offre jusqu’aux perceptions du corps, les chamans assurent que l’on peut, dans une transe tranquille, aux êtres lointains s’enlacer."


"On quitte définitivement un monde et on entre irrémédiablement dans un autre ; il y a une fin, il y a un début et d’impossibles marches arrière."


"Il remue calmement, la neige ne le sidère pas, un des ancêtres de son razana bernois doit lui chuchoter qu’il n’y a pas lieu de la craindre. Ça y est, je l’observe exister à mes côtés, débute une vie à regarder par terre."


"D’apothéose du moment en apothéose du suivant, il va, le calcul ne semble avoir aucune place, ne règne que la joie simple et opiniâtre d’exister. C’est cela vivre avec un chien, c’est réapprendre qu’une heure est faite de soixante minutes valant chacune d’être considérée, s’octroyer le droit de papillonner de l’une à l’autre, se rendre saisissable à la surprise et à l’incertitude, ces sources inépuisables d’espérance."


"Cette modeste lecture me réjouit, le bonheur est un art du peu."


"C’est une prouesse car vivent ici beaucoup de retraités dont le port de loupes fait du moindre tracas une sorte de cataclysme, indifférents à l’essentiel mais qu’aigrissent les pacotilles  ; je n’ai jamais compris qu’à cet âge où l’on a nécessairement croisé les grandes douleurs, pour le moins leurs craintes, on ne traitât pas tout menu froissement par un je-m’en-foutisme exemplaire quitte à le nommer sagesse."

"–  Mais au fait, qui es-tu pour classer les amours  ? En quoi le mien avec Ubac serait méprisable et celui entre Sartre et Beauvoir d’une noblesse absolue  ? –  La réciprocité peut-être  ! –  De l’aimer me suffit. Car, vois-tu, je ne saurai jamais s’il m’aime, jamais. Et aimer sans certitude de l’être en retour…je me demande si l’on ne tient pas ici la définition de l’amour véritable."


"Schopenhauer avait fait de son chien Atma son légataire universel. Si l’idée est plaisante, je crois finalement qu’elle dessert la cause des hommes et des chiens, humaniser, ce n’est pas l’humain partout."


"Heureusement, autour des affolements et qui s’acharnent à les taire, il y a les joies tranquilles, sublimées par ce que l’on sait désormais trop d’elles : leur fugacité."


"Ces urgences ont évidemment lieu les jours fériés ou les week-ends, ces heures à double tarif mais l’on s’en moque. Les questions d’argent n’ont rien à fiche ici, il y aura assez de futilités auxquelles renoncer. Il est touchant d’observer ces propriétaires d’animaux qui ne sont pas tous nés dans l’aisance, comme ils sont prêts à consacrer beaucoup d’un faible trésor à leurs chiens, à leurs chats, à leurs ânes, à leurs autres ridicules, se privant de beaucoup d’écrans plats, de week-ends à Majorque et de ce qui serait pour d’autres non négociable. Lors de la crise économique de 2008, nombre de fins analystes de la vie vraie avaient prédit que chienchiens et minous seraient, comme tout loisir, sacrifiés sur l’autel des choix. Il n’en fut rien, l’argent resta à sa place car de loisir, il y a pour l’essentiel celui d’aimer un autre que soi, cette chose à grand coût et qui n’est d’aucun prix."


"Entre amour et indécence, les hommes pour eux déjà s’interrogent, mais pour le chien, c’est d’autant plus là, vite, imparable, que l’on fait dire ce que l’on veut aux volontés dernières de la bête et à sa propre définition de l’acceptable, le silence égare autant qu’il vient en aide."


"Que l’instant mérite qu’on s’y attarde. On en a un peu ras le front des coachs en bien-être et en tout genre nous intimant de sucer la substantifique moelle de l’instant présent, de ne pas oublier de nous en vouloir si on ne l’a pas fait avant, de penser à nous y astreindre le coup d’après, et nous vantant une vie intemporelle où l’on ne parle en somme que du temps."


"Car lorsque l’on croit en un être qui croit à ce point en vous, lorsqu’une vie si estimable semble vous estimer, alors on glane, ébahi, de précieux motifs pour s’envisager comme quelqu’un d’à peu près valable."


"Avant Ubac, je m’estimais seul dans les forêts et les montagnes, à mon retour, n’ayant pas vu d’homme, à qui voulait l’entendre je claironnais cette solitude. Seul au monde  ! En réalité, m’a-t-il appris, des milliers d’êtres m’ont aperçu, examiné, laissé passer, et il s’est joué autour de moi bien des scènes entre résidents, à plume, à poil, à chlorophylle  : des diplomaties, des luttes, des séductions, des retrouvailles, des assemblées, des cours d’école, des cérémonies, des tours de garde, des peurs et des joies, des naissances et des massacres, des fins et des débuts. J’étais indifférent à ces silences habités, Ubac m’a délivré quelques clefs pour les saisir un peu, promu d’un être inconscient à celui qui   regarde puis voit. Il   m’aide à lire ces histoires, il parle cette langue et m’indique comment m’y prendre pour que s’avive ce que je réduisais à un décor."


"Nos compagnonnages s’équilibrent et ce balancement va bien à l’idée que je me fais de notre relation. La vie est donc assez simple, il nous suffit d’être ensemble, dehors et attentifs."


"En partant , je l’ai aperçu, pas mieux que cela ; après une vie siamoise, c’était la dernière fois, lui savait. Moi, de cette seconde, je n’ai pas été digne. Ce raté me hante encore, à m’en transpercer le ventre, et c’est contre lui que chaque soir depuis, où que je me trouve et quel que soit le refus des nuages et des saisons, je lève les yeux au ciel et je salue Alnitak, Mintaka et Alnilam, les plus nous de toutes les étoiles."


"Nous sommes si fluctuants nous les hommes ; quand la vie s’éteint, on sait l’entrevoir dans ses moindres discrétions, si elle abonde, nous la négligeons."

"Il m’arrive d’envier les vieilles personnes assises au coin du feu, qui regardent par la fenêtre, lisent et font tout à petite vitesse. Elles me semblent soulagées de la tyrannie du faire, prenant le temps de tout et transformant dans une douce conviction le déclin en une sorte de saveur."

"Bientôt il y aura le monde et ses autorisations à être triste ; au classement des peines légitimes, la perte d’un clébard est mal placée, loin, très loin de l’enfant, du centenaire, du soldat inconnu ou de la tourterelle des bois."


"Jusqu’alors inopérantes, les martingales de la consolation commenceront à faire effet et mettront à mal l’abattement. Vivre heureux comme tu l’étais, toi, chaque jour, ne pas être ce que tu n’aurais pas voulu que je sois, cet individu d’une morosité tenace depuis juillet, ne pas faire de ta mort (car c’est ainsi que je saurai la nommer) une fin en soi mais te voir en passant si considérable que tu resteras pour toujours, voilà les mantras qui petit à petit s’animeront en moi, pour de vrai jusqu’à créer l’organe d’aller mieux."

Cédric Sapin-Defour in Son odeur après la pluie, Stock, 2023


Pour conclure, 



+ À lire : Bien plus que le livre du narrateur et de son chien, c'est un hommage à tous nos compagnons à quatre pattes, d'hier et d'aujourd'hui et à tout le bonheur dont ils sont la source. Un livre magnifique.

Et vous, avez-vous déjà lu Son odeur après la pluie de Cédric Sapin-Defour ? Avez-vous déjà lu un récit poignant sur l'affection réciproque entre un humain et un autre animal? 

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Littérairement vôtre,

Aïkà